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Affaire de Ligonnès. Un millier de signalements et une interpellation tonitruante... |

Les photos des personnes recherchées apparaissent sur la plateforme de dénonciation en ligne CrimeStoppers. L’organisation, indépendante de la police britannique, rémunère ses informateurs anonymes. © Jérôme Fouquet/Ouest-France
En dix ans, l’affaire Xavier Dupont de Ligonnès a engendré 1 200 renseignements, signe du fantasme suscité. À l’automne 2019, un retraité français, Guy Joao, en a fait les frais. Arrêté par erreur en Écosse, il aurait été dénoncé sur le site CrimeStoppers, une organisation non-gouvernementale de signalements, qui rémunère ses informateurs.
L’affaire Xavier Dupont de Ligonnès a donné lieu à plus de 1 200 signalements. Par vagues, le père de famille est aperçu quelque part en France. Un filou quitte un hôtel à Dieppe (Seine-Maritime) sans payer, en 2013 ? C’est Ligonnès. Deux paroissiennes de Roquebrune-sur-Argens (Var) intriguées par un visage, en 2018 ? Forcément Ligonnès. À Pont-de-Roide (Doubs), en 2020, un couple offre le café à un vagabond. Et si c’était lui ?
Arrestation en Ecosse
Son nom a aussi traversé la Manche. Le 11 octobre 2019, un retraité de la région parisienne, Guy Joao, est arrêté à tort en Écosse. Sur M6, dans sa seule interview télé, il disait ne pas avoir « la moindre idée de la personne qui l’a balancé » au site CrimeStoppers, une ONG de dénonciation en ligne. « Des personnes nous contactent car elles se sentent mal à l’aise de parler à la police », justifie son service presse.
Mais contrairement à des plateformes en France (Pharos, moncommissariat.fr) ou à l’étranger (Most wanted d’Europol ou Red notices d’Interpol), CrimeStoppers rémunère ses informateurs anonymes, jusqu’à 1 000 £ (1 150 €), dès qu’il y a mise en examen. Mais pour Alain Bauer, professeur de criminologie à Paris, « cette contrepartie incite les gens qui n’ont aucune information, à en donner ».
Alors, simple erreur ? Désir de vengeance ? Ou quidam appâté par le gain ? Toujours est-il que le préjudice peut s’avérer lourd, comme pour Guy Joao, traumatisé. L’avocat franco-britannique William Julié, spécialisé en droit pénal international : « Ils ont beau jeu de dire, on transmet l’information, ensuite les policiers font leur travail… Mais s’il n’y a pas de tri, c’est inquiétant. »
Cette accumulation nécessite aussi des effectifs de police considérables. Trop ? « L’affaire Maddie a engendré des milliers de signalements, rappelle Alain Bauer. Si on affirme que le petit Grégory n’est pas mort, on va le voir partout. C’est le problème du témoignage humain. »
Ironie de l’histoire, l’affaire John List, qui tua, en 1971, mère, femme et enfants, est celle qui se calque le plus à la famille nantaise. L’assureur américain est appréhendé dix-huit ans après… grâce à l’émission America’s most wanted.
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